N° 8159 – Mai 2024

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Les Mobilités

L’être humain est, par essence, mobile. Mais une fois cette affirmation posée, surgit une multitude de questions sur les manières d’être mobile.
Car être mobile ce n’est pas seulement se déplacer, c’est aussi l’engagement sensoriel, physique, intellectuel, émotionnel, que suppose la mobilité. Se mouvoir revêt de surcroît des dimensions politiques, sociales et économiques des plus prégnantes, auxquelles s’ajoutent des variations culturelles et historiques considérables. On voit alors la question de la mobilité se démultiplier et atteindre une complexité qui oblige à parler des mobilités. Intrinsèquement spatiales, elles font l’objet de l’attention des géographes, sensibles à la démultiplication des connexions et des rapports aux lieux qui s’y jouent. Depuis la marche jusqu’à la fusée, de la lenteur à l’hypersonique, à chaque fois se pose la question des manières de se déplacer, de ses modalités, de ses motivations et de ses significations.

Pour étudier les mobilités, les sciences sociales disposent d’outils extrêmement variés, qui permettent de saisir leurs multiples dimensions.

Depuis les cartographies dynamiques qui permettent de tracer les déplacements jusqu’aux itinéraires représentés par les migrants, par exemple pour décrire leur périple et les difficultés rencontrées, c’est tout un ensemble de facteurs qui peuvent être mesurés et analysés avec attention.
La prise en compte en simultané d’approches quantitatives et qualitatives permet ainsi de comprendre toute la richesse et la complexité de ces mobilités. En outre, la dimension politique des mobilités s’est aussi nettement affirmée depuis quelques années du fait à la fois de politiques migratoires qui se veulent de plus en plus restrictives, mais aussi de la prise en compte de tout ce qui peut entraver ou limiter nos mobilités : handicaps, discriminations, injustices et violences liées aux déplacements quotidiens, relevant de l’accès à l’éducation, au travail ou au loisir, qui à chaque fois nous interrogent sur la justice sociale et spatiale, l’accès aux ressources (d’emploi, de formation, etc.) et la valeur accordée aux déplacements des uns et des autres.

Toutes les échelles sont donc mobilisées, allant des mobilités les plus locales aux plus internationales ou transnationales d’entre elles, qu’elles soient migratoires, touristiques ou de travail, et ces échelles interfèrent de plus en plus fortement avec des pratiques plus ou moins connues, plus ou moins visibles.
Cadre en télétravail, touriste en quête d’hivernage stable, femme enceinte en recherche de soins obstétriques dans le rural profond, migrant
dans un camp informel : toutes ces situations relèvent de logiques contrastées qui soulèvent des enjeux de politiques publiques et d’aménagement majeurs. L’urgence climatique et les autres crises environnementales, dont les mobilités sont partie prenante, en montrent aussi toute l’importance.